mercredi, août 08, 2012

L'homme qui danse

Tout est clair, à présent, mais rien n’est éclairci. Je suis une enfant perdue. Je me suis longtemps regardée, intriguée, à travers la vitre. Je me suis vue souffrir et lutter, sans succès, jusqu’à l’épuisement. Je voyais des bouts d’action en gros plan. Je voyais des expressions et des marques sur la peau. Je voyais des bras et des jambes. Je me vois aujourd’hui d’en haut. Je vois les chemins que j’ai pris, les détours et les impasses. Les cercles de l’enfer, tracés par mon père. J’ai beau vouloir m’en éloigner, j’ai beau chercher à m’aventurer dans des contrées lointaines, je finis par rejoindre, invariablement, les chemins que je connais. J’ai été programmée à reproduire ad nauseam des schémas imprimés en moi par mes parents. Une vie pour rien, en somme.
Dans la glace, un corps élastique qui suit les variations de l’exercice physique; un visage dont les traits subissent le passage du temps. Je suis la seule à savoir mon cœur meurtri, marqué au fer rouge. Parfois, je mets la main sur ma poitrine pour sentir la cicatrice laissée par le métal brûlant. Elle se manifeste au détour d’une chanson ; je le vois seul, faisant d’une activité partagée un plaisir égoiste et solitaire, les mouvements saccadés de son corps qui suivent le rythme. Personne d’autre n’a jamais compté. Personne d’autre n’a jamais existé en dehors de lui-même. Il me frôle en quittant la pièce. Sur son visage, un sourire diabolique empreint de satisfaction.

jeudi, août 02, 2012

Le lac

Il faisait chaud ce jour-là sur le lac
Et les lumières ne m’impressionnaient pas
Une famille s’était installée sur le banc derrière nous
Les enfants riaient
On s’amuse d’un rien à leur âge
J’écoutais tes arguments ou plutôt
Je me laissais séduire par le son de ta voix
Soudain j’ai oublié que j’étais là
Au bord du lac artificiel
J’ai oublié la végétation inexistante et le bitume qui gâchait tout
J’ai oublié les cloques à mes pieds
J’ai oublié ma voiture qui fuyait
Quand tu as posé tes lèvres sur les miennes