jeudi, juillet 12, 2007

Après-midi au café

Il insista pour aller à ce café dont je lui avais tellement parlé. G. me fit un signe de la main. Il était installé à la table habituelle, celle dont l’éclairage était le plus pratique pour étudier. Je passai la commande, un capuccino et un thé à la menthe, puis allai m’asseoir dans un des canapés. G. était derrière moi, nous étions presque dos à dos. Je n’osai me retourner. Je ne pouvais que l’imaginer plongé dans son livre de médecine, griffonnant des mémos sur un bout de papier, sirotant un « soda italien ». Je répondais péniblement à la conversation qu’on me faisait. Non, je ne connaissais pas les œuvres de Marden, mais oui j’aimais l’art abstrait, et j’étais convaincue qu’un bon artiste pouvait toucher n’importe quel public, même le moins cultivé… Est-ce qu’il était en train d’écouter la conversation ? Ou alors, son ipod jouait peut-être du Jacques Loussier ? La sensualité qui se dégageait de tout son être m’obsédait de plus en plus. Les premières fois que je l’avais aperçu, studieux, silencieux, presque distant, je lui avais à peine prêté attention. Ce n’est que plus tard, quand il m’avait parlé, que j’avais découvert ce qui faisait son charme et venait comme transcender sa beauté physique : sa chaleur, sa douceur, cette façon qu’il avait de voir les choses, de corriger les détails insignifiants du quotidien. Je décidai de trouver un prétexte pour me retourner. Je renversai mon thé sur la table et me levai pour aller chercher une serviette, en m’excusant. Je ne sais pas combien de temps exactement s’était écoulé depuis mon arrivée au café. Il ne restait, derrière moi, qu’un groupe de filles qui lisait des romans à l’eau de rose. Il s’était donc enfui, m’avait laissée là. Je me plaisais à imaginer qu’il avait agi par jalousie. Il devait sûrement maudire cet homme qu’il avait vu avec moi, ce rival, ce ver de terre. J’appris peu après cet événement que G. était marié. Je réalisai qu’il n’avait jamais eu pour moi qu’une amitié fraternelle. L’éloignement que j’avais ressenti était simplement l’expression de cette réalité, aussi décevant et banal que cela puisse paraître. Aujourd'hui encore, je ne peux m'empêcher de rougir quand je repense à la fièvre qui m'avait animée cet après-midi-là.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Ah la la...

Encore à fantasmer ma petite Barbie...

gavroche...